Le Parc Soubise, témoin de l’histoire tumultueuse de la région

Le Parc Soubise

Le domaine du Parc Soubise, sur la commune de Mouchamps en Vendée, a toujours été la propriété de familles d’ancienne noblesse du Bas-Poitou. Le lieu fut d’abord occupé par les civilisations antiques : des fouilles opérées à la fin du XIXème siècle ont mis à jour des tombes de l’époque Gallo-Romaine.

Au XIIème siècle, la propriété fut le parc de chasse et de pêche des seigneurs de Mauléon puis de Lusignan. Cette famille célèbre donna le dernier roi chrétien à la ville de Jérusalem au temps des croisades et, dans un autre genre, une fée moitié femme moitié serpent, la fée Mélusine.

Le domaine du Parc Soubise devint en 1247, par un mariage entre Valence de Lusignan et Guillaume de Parthenay, la propriété de la famille Parthenay l’Archevêque. Le grand et puissant château fort construit au Moyen Age fut peu à peu transformé en château Renaissance, style rapporté d’Italie lors des guerres du même nom menées par Louis XII et plus tard François Ier.

C’est une grande figure féminine de son époque qui brille au Parc Soubise : Michèle de Saubonne (1485-1549), épouse de Jean V de Parthenay et amie du grand mathématicien François Viète. Michèle est elle-même une mathématicienne de renommée et reçoit à sa cour au Parc Soubise tout ce qui compte d’intellectuels dans la province. Rabelais viendra en voisin ainsi qu’Aggrippa d’Aubigné un peu plus tard.

Cette « dame du Parc Soubise » fut dame d’atours de la reine Anne de Bretagne, épouse du roi Louis XII, puis gouvernante de leur fille, Renée de France. Dotée d’un fort caractère, Michèle n’hésite pas à dire ce qu’elle pense, et sera l’une des premières protectrices de Bernard Palissy, l’inventeur de la céramique.

Une rencontre décisive pour la Vendée

A l’occasion du mariage de René de France avec le duc de Ferrare, Michèle de Saubonne rencontre Jean Calvin, théologien français et initiateur de la Réforme, et se convertit à ses idées et, femme de poigne et de conviction, de retour au Parc Soubise en 1536, Michèle s’attache à imposer vigoureusement sa nouvelle foi protestante à toute la région. C’est ainsi que naquit le protestantisme en Vendée.

Sa petite fille, la très belle, érudite et austère Catherine de Parthenay l’Archevêque, épouse du protestant René de Rohan, hérite du domaine et tient sa cour au Parc Soubise où vient la visiter son cousin Henri de Navarre, futur Henri IV. Bien que sous son charme, il ne peut s’empêcher de reconnaître que Catherine a la dent dure. Il dira d’elle « Voici venir Madame de Rohan ; gardez-vous mesdames qu’elle ne crache sur vous. Pour le moins, si elle n’y crache elle en médira ». Catherine est une bâtisseuse et une gestionnaire hors pair. C’est à elle que la propriété doit les magnifiques bâtiment du XVIIème siècle: la grande grange à l’architecture unique dans la région, l’ample grenier à charpente de coque de bateau renversée et le cellier.  Le couple aura 2 fils, Benjamin et Henri. Benjamin mourra jeune suite à duel crapuleux et Henri deviendra la fierté de ses parents.

Henri chef des armées huguenotes

La vie sous les Rohan n’est pas un long fleuve tranquille. En effet les guerres de religions entre protestants et catholiques sont finies. L’Edit de Nantes qui met fin au conflit est signé en 1598 par Henry IV. Il autorise la liberté religieuse et permet toujours aux grands féodaux de lever des armées et de tenir place forte. Il n’en faut pas moins pour les protestants pour reprendre les combats que l’on appellera « les guerres huguenotes » de 1621 à 1628. Les affrontements sont fréquents et s’étendent rapidement dans tout le sud-ouest. Le duc et la duchesse sont des protestants passionnés. Le Parc et ses habitants deviennent vite un centre actif de la révolte contre le roi Louis XIII. Le fils de Catherine et de René, Henri de Rohan prend la tête des armées protestantes avec le soutien de son frère Benjamin et de sa mère pour aller combattre les armées du roi menées par Richelieu. Celui-ci  connaît bien la Vendée pour en avoir été l’évêque. Acculée à la Rochelle en 1627 où elle attendait l’aide des anglais, l’armée protestante d’Henri est assiégée et doit se rendre en 1628, après avoir mangé chevaux, rats, chiens, chats et … pour finir les selles de chevaux bouillies !

Richelieu, pour éviter une nouvelle rébellion, décide de faire démanteler tous les châteaux des chefs protestants. C’est ainsi que le château du Parc Soubise sera détruit, puis vendu. Henri de Rohan est chassé de la cour par Catherine de Médicis. Un malheur n’arrivant jamais seul, la fille d’Henri de Rohan, Marguerite, tombe amoureuse d’un noble catholique et de famille aussi ancienne mais moins prestigieuse, Charles-Auguste de Chabot. Elle l’épouse par amour, au désespoir de ses parents mais avec l’accord de Louis XIV, trop heureux de voir rentrer dans le giron de l’église catholique le dernier rejeton de cette illustre famille protestante !

Armoiries Parthenay

Armoiries  Rohan-Soubise

Armoiries Rohan-Chabot

La tourmente des guerres de Vendée

Au milieu du XVIIIème siècle, un autre protestant, armateur à la Rochelle, Monsieur de Bonfils écuyer et secrétaire-conseiller du roi achète le domaine  et commence à construire le château dont il reste aujourd’hui une belle ruine. Mais il revend bientôt le domaine car il est appelé à Versailles. Par une ironie de l’histoire c’est un membre de la famille de Chabot qui rachète la propriété et finit la construction du château en 1784, en commençant par la chapelle qui est aujourd’hui classée monument historique. La vie y est bien agréable au Parc Soubise selon les chroniques de l’époque de l’abbé Staub, curé de Mouchamps.

Mais l’histoire de France rattrape ce petit coin de Vendée lors de la révolution française de 1789 et plus particulièrement pendant la Terreur de 1793. Les vendéens, attachés à leur liberté de conscience et à leur foi catholique soutiennent les prêtres qui veulent rester fidèles à leur conviction en refusant de prêter serment à la République lors de la Constitution Civile du Clergé en 1790. Les prêtres « réfractaires » et ceux qui les soutiennent sont réprimés et envoyés en Guyane aux travaux forcés. Ils sont emprisonnés. Beaucoup d’entre eux meurent de mauvais traitements. Les vendéens se rebellent également car ils ne veulent pas être enrôlés dans l’armée républicaine. La Vendée s’embrase. Commence alors une guérilla fratricide entre la grande armée catholique et royale et le nouveau pouvoir révolutionnaire. Si la Vendée remporte des grandes victoires, elle est écrasée fin 1793.  Pour les punir de leur rébellion, la Convention envoie ce que l’on a appelé avec effroi les colonnes infernales en janvier 1794. Leur seul but est de ravager la Vendée et ses habitants.

Le 31 janvier 1794, la colonne infernale de Lachenay arrive au Parc Soubise après avoir ramassé sur son passage 200 femmes, hommes, enfants, vieillards. Les soldats les alignent le long du château et les fusillent… puis mettent le feu au château.

Aujourd’hui encore les ruines de ce drame sont intactes et se dressent comme témoin d’un passé douloureux pour la région.

La vie reprend au Parc Soubise après le Concordat de 1802 et le domaine, toujours entre les mains de la famille de Chabot, se relève. La pêche et la chasse reprennent leur droit et aujourd’hui encore cette tradition perdure.

La guerre de 1939-45 voit la Vendée accueillir des nombreux réfugiés qui fuient l’invasion nazi. Le Parc Soubise sera un réfuge pour des enfants juifs cachés par la famille. Le comte Pierre et la comtesse Zoé de Chabot sont d’ailleurs reconnus « justes parmi les nations » sur le mémorial de Yad Vashem en Israël.

Le Parc Soubise, offre encore de nos jours le charme de son parc, de ses étangs, de ses bâtiments historiques aux visiteurs désireux de faire une plongée dans l’histoire authentique de la région.